Les ministère des Affaires sociales et de la Santé, deux domaines désormais rassemblés sous la tutelle d'une seule ministre, doit être un ministère symbolique fort de la présidence Hollande, comme l'ont annoncé la plupart des commentateurs au moment de sa création en mai 2012.
Pour mener à bien la politique de santé publique, le ministère s’appuie principalement sur la direction générale de la Santé (DGS) et la direction générale de l’Offre de soins (DGOS) au niveau national, et les agences régionales de santé (ARS), au niveau local.
L’administration gouvernementale de la santé publique française a traditionnellement souffert de « profondes faiblesses organisationnelles ». La toute première structure gouvernementale dédiée à la santé publique française est créée en 1889, sous forme d’une direction de l’Assistance et de l’hygiène rattachée au ministre de l’Intérieur.
En 1894 le ministère du Commerce, de l’industrie, des postes et télégraphes intègre une direction de la Prévoyance et de l’assurance sociales, organisée en deux bureaux (caisse d’épargne, assurances, retraites, coopération d’une part, et syndicats professionnels de l’autre), afin de répondre aux changements de la réglementation du travail, entraînés par la seconde révolution industrielle.
C’est le début timide d’un système de santé publique. L’année suivante, ces deux bureaux sont intégrés à la direction du Travail et de l’industrie rattachée au ministère du Commerce, de l’industrie, des postes et des télégraphes ; celui-ci deviendra ensuite le ministère du Commerce, de l’industrie et du travail.
Le 26 octobre 1906, le président Clémenceau créé le ministère du Travail et de la prévoyance sociale, confié au socialiste René Viviani ; les pouvoirs et le budget attribués à la santé restent cependant très limités (1% du budget national), et son administration peu développée. En juillet 1920, après les ravages de la grippe espagnole, le socialiste Jules-Louis Breton est nommé ministre de l’Hygiène, de l’assistance et de la prévoyance sociale.
Un portefeuille alors encore peu étayé, mais dont la création permet de dégager les grands « thèmes » de la politique sanitaire publique française : la lutte contre les épidémies et les maladies (tuberculose, maladies vénériennes, cancer), la lutte contre l’alcoolisme, la protection maternelle et infantile, ainsi que la salubrité et la santé mentale. Dans le but de soutenir cette politique est créé l’Office national d’hygiène social (ONHS) (1924-1934), un organisme parapublic fondé en partie par la mission philanthrope américaine Rockfeller, et censé devenir la base d’un service technique du futur ministère de la Santé.
Il faut attendre la loi du 4 avril 1930 pour voir la création d’un ministère propre à la Santé publique, qui se retrouve rattaché à l’Éducation physique de 1934 à 1936, à la Famille pendant la seconde guerre mondiale (quand il ne disparaît pas totalement en s’intégrant à d’autres ministères sous forme de « service de santé »), et à la Population dès 1946.
En 1953, la première version d’un Code de la santé publique vient définir les droits des personnes en matière de santé, les droits particuliers propres à certaines populations (femmes et enfants) ou maladies (maladies mentales, SIDA) et dépendances (alcoolisme, tabagisme, toxicomanie), et le droit des professions, des produits, des établissements et des services de santé.
En 1956, le ministère de la Santé publique devient le ministère des Affaires sociales, en incorporant le système de Sécurité sociale, auparavant rattaché au Travail. Sous la Vème république, les fonctions du ministère changent selon les gouvernements, et l’étiquette « Santé » est parfois délaissée au profit des termes « Affaires sociales » ou « Solidarité ».
Le ministère de la Santé a pour mission de mener à bien la politique du gouvernement en termes de santé publique. On distingue trois grandes lignes d’action:
La prévention et la sensibilisation aux risques sanitaires à l’aide de campagnes de communication et de mobilisation (vaccination, lutte contre le tabagisme, l’alcoolisme et la toxicomanie, transmission du VIH…), et d’études engagées par la direction de l’Animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES), et la direction de recherche, de l’évaluation, des études et des statistiques (DREES).
L’organisation et le contrôle du système de santé au travers du Code de la santé publique, mis en œuvre par la direction générale de la santé (DGS), la direction de la sécurité sociale (DSS), et l’inspection générale des affaires sociales (IGAS).
La formation des professionnels de la santé assurée en partenariat avec le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche.
1965-2025 : L’amiante est un matériau de construction très populaire en France dans les années 70, malgré de nombreuses études qui s’accumulent dès le début du vingtième siècle, démontrant sa haute toxicité et son caractère cancérigène. L’État français attend 1997 avant d’interdire totalement la fabrication, l’importation ou la commercialisation de l’amiante. Elle rejoint ainsi les sept autres pays européens (Allemagne, Italie, Danemark, Suède, Pays-Bas, Norvège et Suisse) à avoir banni le matériau. Malgré tout, on attribue à l’exposition à l’amiante environ 35.000 décès en France entre 1965 et 1995, et l’on estime qu’elle entraînera jusqu’à 100 000 décès d’ici 2025.
Août 1972 : Le talc Morhange devient mortel à la suite d’une erreur de conditionnement. Un taux toxique d’hexachlorophène, un puissant bactéricide, se retrouve dans le talc, causant le décès de 36 bébés et des blessures à plus de 200 autres. Le ministère de la Santé décide de se porter partie civile auprès des familles de victimes, et retire les flacons de la vente, trop tard pour certains.
1973-2010 : Le Chlordécone est un produit antiparasitaire utilisé dans les bananeraies en Guadeloupe et en Martinique entre 1968 et 1993. On enregistre à cette époque une forte augmentation des cas de cancer de la prostate dans les deux départements d’outre-mer. Les Etats-Unis retirent le Chlordécone du marché dès 1976, la France n’interdit sa commercialisation en métropole qu’en 1990, tout en continuant d’autoriser son utilisation aux Antilles les trois années suivantes. Ceci entraîne de graves conséquences tant pour l’environnement (pollution des sols et des eaux) que pour la santé de la population locale, dont une partie subsiste en cultivant ses propres fruits et légumes. En 2008, un Plan d’action Chlordécone est mis en œuvre par le gouvernement français, afin d’analyser les effets de l’insecticide et d’amenuiser les risques de contamination. Une action que même le Sénat qualifie d’« un peu tardive ».
1977 : Le Distilbène est le nom commercial donné à un oestrogène de synthèse donné aux femmes enceintes pour prévenir les risques de fausses couches ou de prématurité, et traiter les hémorragies de grossesse. Son efficacité est remise en cause en 1953 , puis une étude de 1971 attribue à son utilisation l’apparition précoce d’un cancer de l’utérus très rare (ACC) chez des centaines de jeunes filles, ainsi que la malformation de nombreux nouveaux-nés dont les mères ont été traitées. Les États-Unis retirent l’hormone du marché immédiatement, la France attend 1977. Au moins 160.000 enfants français dont la majorité sont nés dans les années 1970 ont été affectés par le Distilbène.
1979-2009 : Le Médiator traitement contre le diabète utilisé comme coupe faim. Commercialisé par les laboratoires Servier à partir de 1976 et interdit en 2009, le Médiator aurait causé la mort d’au moins 500 personnes, selon Jean Marimbert, directeur général de l’Agence de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS). La commission de pharmacovigilance de l’AFSSAPS avait signalé l’inefficacité du produit en 1999, mais l’Agence avait attendu 2007 pour recommander aux médecins de ne pas le prescrire comme coupe faim. La pneumologue Irène Frachon lance l’alerte dans la presse fin 2008 et dénonce « un silence impressionnant des autorités de santé ».
1985 – 1997 L’Isoméride est un médicament coupe-faim mis en vente en France par les laboratoires Servier, fabricants du Médiator. Pris par plus de sept millions de Français entre 1985 et 1997, l’Isoméride est retiré du marché cette année-là suite à un rapport d’experts italiens, commandité par l’Agence européenne du médicament, qui démontre que l’utilisatio de l’Isoméride provoque de graves maladies cardio-pulmonaires.
1987-1999 : Le sang contaminé une enquête journalistique de 1991 révèle que le Centre national de transfusion sanguine (CNTS) a négligemment distribué à des hémophiles, de 1984 à la fin de l’année 1985, des produits sanguins sans appliquer les mesures de contrôles nécessaires au dépistage du VIH. Bilan : au moins 1300 personnes séropositives, et plus de 600 décès d’enfants et d’adultes. Le tribunal s’empare de l’affaire en 1999 ; deux des trois personnes inculpées, Georgina Dufois, alors ministre des Affaires sociales, et Laurent Fabius, ancien Premier ministre, sont relaxés. Le troisième accusé, Edmond Hervé, ancien secrétaire d’État à la Santé, sera condamné mais exempté de peine.
2003 : La canicule La vague de chaleur qui a accablé la France durant l’été 2003 a provoqué la mort de près de 15 000 personnes, en particulier des personnes âgées hospitalisées ou placées en institution spécialisée. Un scandale sanitaire pour l’opinion publique, qui dénonce un manque flagrant de coordination de la part du gouvernement, en particulier du ministère de la Santé. Voyant l’ampleur de la catastrophe, Lucien Abenhaïm, Directeur Général de la Santé présente sa démission en août, et déclare à propos du ministre de la Santé Jean-François Mattéi : « L’approche qu’à privilégié le ministre au plus fort de la crise est à mon sens critiquable tant sur la forme que sur le fond ».
1989 - 2011 : Hormones de croissance plus d’une centaine de français morts des suites de la maladie de Creutzfeldt-Jacob, après avoir suivi un traitement pour favoriser leur croissance entre 1982 et 1985. L’Institut Pasteur, l’association France Hypophyse et la Pharmacie centrale des Hôpitaux de Paris ont tous les trois été associés à la vente et à la distribution de l’hormone. Un procès ouvert en première instance en 2008 ne retient aucune charge contre les sept scientifiques accusés, cependant la Cour d’appel de Paris qui rejuge l’affaire en 2010 condamne deux des personnes inculpées, la pédiatre Elizabeth Mugnier, et l’ancien directeur du laboratoire de l’Institut Pasteur, Fernand Dray, pour « homicide involontaire » et « tromperie aggravée ».
Marisol Touraine est la nouvelle ministre des Affaires sociales et de la santé dans le premier gouvernement dirigé par Jean-Marc Ayrault. Depuis le 16 mai 2012, elle est la « numéro 6 » du gouvernement Ayrault. Elle est assistée dans sa tâche par trois ministres déléguées : Michèle Delaunay aux Personnes âgées et à la Dépendance, Dominique Bertinotti à la Famille et Marie-Arlette Carlotti aux Personnes handicapées. Son premier dossier important concerne l’une des promesses de campagne de François Hollande, à savoir « le retour partiel à la retraite à 60 ans pour les personnes ayant travaillé quarante et un ans sans interruption ».
Elle est la fille du sociologue et économiste Alain Touraine et de la chercheuse chilienne Adriana Arenas Pizarro. De cette paternité elle hérite de son père un goût pour le social et l’économie ainsi qu’une prédilection pour le travail et la discrétion. Du sang de sa mère latino, elle doit une énergie et un tempérament que tous lui reconnaissent. Marisol Touraine est née le 7 mars 1959 à Paris où elle grandit. Après l’école normale et une agrégation de sciences économiques et sociales, elle rentre à Science Po Paris puis fait un cursus à Harvard. En 1988, elle est nommée conseillère chargée des questions géostratégiques dans le cabinet de Michel Rocard alors premier ministre du président François Mitterrand. Elle restera à ce poste jusqu’en 1991, année de la seconde cohabitation des deux septennats Mitterrand. Entre temps, elle épouse Michel Reveyrand de Menthon, ambassadeur de France au Mali de 2006 à 2010, et aujourd’hui en poste au Tchad. Ils ont trois enfants.
Une carrière au service des questions sociales
Sa carrière politique commence vraiment en 1997 lorsqu’elle décide de faire de l’Indre et Loire, sa terre électorale où elle est élue députée dans la troisième circonscription. Mais en 2002, elle la perd face au candidat UMP Jean-Jacques Descamps... pour mieux reconquérir sa cette circonscription en 2007 au second tour avec une courte majorité de 50,22 %. Elle s’investit beaucoup dans le tissu local et depuis 1998, Marisol Touraine est conseillère générale d’Indre-et-Loire, élue dans le canton de Montbazon, et présidente du conseil général d’Indre-et-Loire depuis 2011.
Conseiller d’État, elle s’est immergée depuis 1997 dans les questions de protection sociale et lorsque François Hollande prend les rennes du PS, il lui confie un secrétariat national sur ce thème. Elle est ainsi devenue l’une des rares spécialistes des questions de Sécurité sociale et de santé à l’Assemblée qui ne soit pas issue du monde médical. Concernant ses prises de position et son engagement, Marisol Touraine est membre du Siècle et engagée en faveur du Traité constitutionnel en 2005, et fait aussi partie du think tank socialiste « A gauche, en Europe » crée notamment par Michel Rocard, Pierre Moscovici et Dominique Strauss-Khan en 2003, visant à la refondation du socialisme après le « coup de tonnerre » du 21 avril 2002.
C’est en 2010, où simple députée, elle se fait connaitre au niveau national car elle est en charge pour le PS de l’épineux sujet de la réforme des retraites et se révèle être à l’Assemblée nationale, une opposante tenace à la politique de François Fillon. Le ministre du Travail de l’époque chargé de défendre le texte, Éric Woerth, s’il a dû batailler contre elle reconnaît néanmoins : « Elle a du caractère mais on peut parler avec elle. C’est quelqu’un de sérieux, travailleur, qui a porté ses attaques sur le fond ».
Un engagement politique et social fort pendant la campagne présidentielle
C’est ainsi que soutien dans un premier temps de Dominique Strauss-Khan, elle rejoint François Hollande dès l’éclatement de l’affaire du Sofitel qui lui confie la direction du pôle « Social, Santé, Handicap, Personnes âgées » de la campagne présidentielle. Elle s’engage dès le début de la campagne des primaires derrière François Hollande, et obtient très vite un rôle important dans l’équipe. « C’est un vrai bonheur de travailler avec François Hollande. Il est à la fois à l’écoute et attend beaucoup de notre travail», confiait-elle à 20 Minutes au début de la campagne présidentielle. Elle intervient aussi sur le dossier controversé de « l’euthanasie » dont l’expression est absente des 60 propositions du candidat PS. « On va effectivement dans ce sens », affirmait Marisol Touraine sur Europe1. « Nous voulons définir un cadre qui réponde - au-delà de ce que la loi permet aujourd’hui - aux volontés de ceux qui souffrent », précise-t-elle. Mais elle écarte l’idée d’« autoriser le suicide assisté ».
Pourtant, François Hollande n’a pas tranché à ce sujet même s’il a parlé d’une amélioration des soins palliatifs et s’est avancé prudemment vers un «encadrement». «Il faudra une procédure: quand une personne demande, parce qu’elle n’en peut plus, quand sa famille appuie cette demande, qu’elle est réitérée, que quatre médecins se sont eux-mêmes prononcés, alors il sera possible d’en terminer avec cette souffrance», avait-il expliqué à l’AFP. Mais il n’a jamais parlé de loi, plutôt «d’encadrer cette mort dans la dignité».
Le candidat socialiste lui demande aussi de réfléchir sur une réforme du quotient familial. Elle penche pour une amélioration du système existant plutôt qu’une remise à plat assortie de la création d’un crédit d’impôt imaginée par Michel Sapin. Au lendemain d’une fuite dans la presse, le candidat socialiste tranche pour son idée. Il faut dire que malgré sa discrétion, elle sait monter au créneau quand c’est nécessaire à l’exemple de la veille du sommet social de Nicolas Sarkozy en janvier. Lors d’une interview accordée à 20 Minutes le 17 janvier 2012, elle taxe le sommet social de « gesticulation de campagne ». Et poursuit : «Sur la forme, ce sommet est choquant. Comment peut-il prétendre engager des réformes aussi fondamentales alors que des élections très importantes doivent avoir lieu dans quelques semaines. La plupart des mesures ne pourront même pas être mises en œuvre».
Parité
Marisol Touraine est aussi l’une des premières à insister sur l’importance de la parité dans la composition du gouvernement et se fait un devoir de peser sur cette question dans sa constitution. Le 10 mai 2012, elle avait déclaré à l’AFP : « Il faut des femmes aux postes qui comptent parmi les postes ministériels importants » car « La parité, c’est la pleine reconnaissance du rôle politique des femmes». Ainsi, la nouvelle ministre s’était déclarée en accord avec la sénatrice socialiste Nicole Bricq, qui espérait que les femmes du prochain gouvernement ne seraient pas reléguées à des postes secondaires.
Nicole Bricq, la présidente PS de la commission des finances du Sénat déclarait à Public Sénat le 9 mai 2012 : «Il ne faut pas faire les « Hollandettes », en référence aux « jupettes » du gouvernement Juppé en 1995 qui définissaient des ministres féminins de second plan. Elle ajoutait : « Si on a les sarkozettes bis et les jupettes ter, ce n’est pas bien ». Inquiétude à laquelle Marisol Touraine répondait : «Rien dans le parcours politique de François Hollande ne permet d’imaginer qu’il traiterait les femmes de son gouvernement comme l’a fait Alain Juppé en 1995. Je ne sais rien de la future composition de l’équipe, François Hollande y réfléchit de son côté, mais je n’ai aucun doute sur sa volonté en la matière».
Les ministère des Affaires sociales et de la Santé, deux domaines désormais rassemblés sous la tutelle d'une seule ministre, doit être un ministère symbolique fort de la présidence Hollande, comme l'ont annoncé la plupart des commentateurs au moment de sa création en mai 2012.
Pour mener à bien la politique de santé publique, le ministère s’appuie principalement sur la direction générale de la Santé (DGS) et la direction générale de l’Offre de soins (DGOS) au niveau national, et les agences régionales de santé (ARS), au niveau local.
L’administration gouvernementale de la santé publique française a traditionnellement souffert de « profondes faiblesses organisationnelles ». La toute première structure gouvernementale dédiée à la santé publique française est créée en 1889, sous forme d’une direction de l’Assistance et de l’hygiène rattachée au ministre de l’Intérieur.
En 1894 le ministère du Commerce, de l’industrie, des postes et télégraphes intègre une direction de la Prévoyance et de l’assurance sociales, organisée en deux bureaux (caisse d’épargne, assurances, retraites, coopération d’une part, et syndicats professionnels de l’autre), afin de répondre aux changements de la réglementation du travail, entraînés par la seconde révolution industrielle.
C’est le début timide d’un système de santé publique. L’année suivante, ces deux bureaux sont intégrés à la direction du Travail et de l’industrie rattachée au ministère du Commerce, de l’industrie, des postes et des télégraphes ; celui-ci deviendra ensuite le ministère du Commerce, de l’industrie et du travail.
Le 26 octobre 1906, le président Clémenceau créé le ministère du Travail et de la prévoyance sociale, confié au socialiste René Viviani ; les pouvoirs et le budget attribués à la santé restent cependant très limités (1% du budget national), et son administration peu développée. En juillet 1920, après les ravages de la grippe espagnole, le socialiste Jules-Louis Breton est nommé ministre de l’Hygiène, de l’assistance et de la prévoyance sociale.
Un portefeuille alors encore peu étayé, mais dont la création permet de dégager les grands « thèmes » de la politique sanitaire publique française : la lutte contre les épidémies et les maladies (tuberculose, maladies vénériennes, cancer), la lutte contre l’alcoolisme, la protection maternelle et infantile, ainsi que la salubrité et la santé mentale. Dans le but de soutenir cette politique est créé l’Office national d’hygiène social (ONHS) (1924-1934), un organisme parapublic fondé en partie par la mission philanthrope américaine Rockfeller, et censé devenir la base d’un service technique du futur ministère de la Santé.
Il faut attendre la loi du 4 avril 1930 pour voir la création d’un ministère propre à la Santé publique, qui se retrouve rattaché à l’Éducation physique de 1934 à 1936, à la Famille pendant la seconde guerre mondiale (quand il ne disparaît pas totalement en s’intégrant à d’autres ministères sous forme de « service de santé »), et à la Population dès 1946.
En 1953, la première version d’un Code de la santé publique vient définir les droits des personnes en matière de santé, les droits particuliers propres à certaines populations (femmes et enfants) ou maladies (maladies mentales, SIDA) et dépendances (alcoolisme, tabagisme, toxicomanie), et le droit des professions, des produits, des établissements et des services de santé.
En 1956, le ministère de la Santé publique devient le ministère des Affaires sociales, en incorporant le système de Sécurité sociale, auparavant rattaché au Travail. Sous la Vème république, les fonctions du ministère changent selon les gouvernements, et l’étiquette « Santé » est parfois délaissée au profit des termes « Affaires sociales » ou « Solidarité ».
Le ministère de la Santé a pour mission de mener à bien la politique du gouvernement en termes de santé publique. On distingue trois grandes lignes d’action:
La prévention et la sensibilisation aux risques sanitaires à l’aide de campagnes de communication et de mobilisation (vaccination, lutte contre le tabagisme, l’alcoolisme et la toxicomanie, transmission du VIH…), et d’études engagées par la direction de l’Animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES), et la direction de recherche, de l’évaluation, des études et des statistiques (DREES).
L’organisation et le contrôle du système de santé au travers du Code de la santé publique, mis en œuvre par la direction générale de la santé (DGS), la direction de la sécurité sociale (DSS), et l’inspection générale des affaires sociales (IGAS).
La formation des professionnels de la santé assurée en partenariat avec le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche.
1965-2025 : L’amiante est un matériau de construction très populaire en France dans les années 70, malgré de nombreuses études qui s’accumulent dès le début du vingtième siècle, démontrant sa haute toxicité et son caractère cancérigène. L’État français attend 1997 avant d’interdire totalement la fabrication, l’importation ou la commercialisation de l’amiante. Elle rejoint ainsi les sept autres pays européens (Allemagne, Italie, Danemark, Suède, Pays-Bas, Norvège et Suisse) à avoir banni le matériau. Malgré tout, on attribue à l’exposition à l’amiante environ 35.000 décès en France entre 1965 et 1995, et l’on estime qu’elle entraînera jusqu’à 100 000 décès d’ici 2025.
Août 1972 : Le talc Morhange devient mortel à la suite d’une erreur de conditionnement. Un taux toxique d’hexachlorophène, un puissant bactéricide, se retrouve dans le talc, causant le décès de 36 bébés et des blessures à plus de 200 autres. Le ministère de la Santé décide de se porter partie civile auprès des familles de victimes, et retire les flacons de la vente, trop tard pour certains.
1973-2010 : Le Chlordécone est un produit antiparasitaire utilisé dans les bananeraies en Guadeloupe et en Martinique entre 1968 et 1993. On enregistre à cette époque une forte augmentation des cas de cancer de la prostate dans les deux départements d’outre-mer. Les Etats-Unis retirent le Chlordécone du marché dès 1976, la France n’interdit sa commercialisation en métropole qu’en 1990, tout en continuant d’autoriser son utilisation aux Antilles les trois années suivantes. Ceci entraîne de graves conséquences tant pour l’environnement (pollution des sols et des eaux) que pour la santé de la population locale, dont une partie subsiste en cultivant ses propres fruits et légumes. En 2008, un Plan d’action Chlordécone est mis en œuvre par le gouvernement français, afin d’analyser les effets de l’insecticide et d’amenuiser les risques de contamination. Une action que même le Sénat qualifie d’« un peu tardive ».
1977 : Le Distilbène est le nom commercial donné à un oestrogène de synthèse donné aux femmes enceintes pour prévenir les risques de fausses couches ou de prématurité, et traiter les hémorragies de grossesse. Son efficacité est remise en cause en 1953 , puis une étude de 1971 attribue à son utilisation l’apparition précoce d’un cancer de l’utérus très rare (ACC) chez des centaines de jeunes filles, ainsi que la malformation de nombreux nouveaux-nés dont les mères ont été traitées. Les États-Unis retirent l’hormone du marché immédiatement, la France attend 1977. Au moins 160.000 enfants français dont la majorité sont nés dans les années 1970 ont été affectés par le Distilbène.
1979-2009 : Le Médiator traitement contre le diabète utilisé comme coupe faim. Commercialisé par les laboratoires Servier à partir de 1976 et interdit en 2009, le Médiator aurait causé la mort d’au moins 500 personnes, selon Jean Marimbert, directeur général de l’Agence de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS). La commission de pharmacovigilance de l’AFSSAPS avait signalé l’inefficacité du produit en 1999, mais l’Agence avait attendu 2007 pour recommander aux médecins de ne pas le prescrire comme coupe faim. La pneumologue Irène Frachon lance l’alerte dans la presse fin 2008 et dénonce « un silence impressionnant des autorités de santé ».
1985 – 1997 L’Isoméride est un médicament coupe-faim mis en vente en France par les laboratoires Servier, fabricants du Médiator. Pris par plus de sept millions de Français entre 1985 et 1997, l’Isoméride est retiré du marché cette année-là suite à un rapport d’experts italiens, commandité par l’Agence européenne du médicament, qui démontre que l’utilisatio de l’Isoméride provoque de graves maladies cardio-pulmonaires.
1987-1999 : Le sang contaminé une enquête journalistique de 1991 révèle que le Centre national de transfusion sanguine (CNTS) a négligemment distribué à des hémophiles, de 1984 à la fin de l’année 1985, des produits sanguins sans appliquer les mesures de contrôles nécessaires au dépistage du VIH. Bilan : au moins 1300 personnes séropositives, et plus de 600 décès d’enfants et d’adultes. Le tribunal s’empare de l’affaire en 1999 ; deux des trois personnes inculpées, Georgina Dufois, alors ministre des Affaires sociales, et Laurent Fabius, ancien Premier ministre, sont relaxés. Le troisième accusé, Edmond Hervé, ancien secrétaire d’État à la Santé, sera condamné mais exempté de peine.
2003 : La canicule La vague de chaleur qui a accablé la France durant l’été 2003 a provoqué la mort de près de 15 000 personnes, en particulier des personnes âgées hospitalisées ou placées en institution spécialisée. Un scandale sanitaire pour l’opinion publique, qui dénonce un manque flagrant de coordination de la part du gouvernement, en particulier du ministère de la Santé. Voyant l’ampleur de la catastrophe, Lucien Abenhaïm, Directeur Général de la Santé présente sa démission en août, et déclare à propos du ministre de la Santé Jean-François Mattéi : « L’approche qu’à privilégié le ministre au plus fort de la crise est à mon sens critiquable tant sur la forme que sur le fond ».
1989 - 2011 : Hormones de croissance plus d’une centaine de français morts des suites de la maladie de Creutzfeldt-Jacob, après avoir suivi un traitement pour favoriser leur croissance entre 1982 et 1985. L’Institut Pasteur, l’association France Hypophyse et la Pharmacie centrale des Hôpitaux de Paris ont tous les trois été associés à la vente et à la distribution de l’hormone. Un procès ouvert en première instance en 2008 ne retient aucune charge contre les sept scientifiques accusés, cependant la Cour d’appel de Paris qui rejuge l’affaire en 2010 condamne deux des personnes inculpées, la pédiatre Elizabeth Mugnier, et l’ancien directeur du laboratoire de l’Institut Pasteur, Fernand Dray, pour « homicide involontaire » et « tromperie aggravée ».
Marisol Touraine est la nouvelle ministre des Affaires sociales et de la santé dans le premier gouvernement dirigé par Jean-Marc Ayrault. Depuis le 16 mai 2012, elle est la « numéro 6 » du gouvernement Ayrault. Elle est assistée dans sa tâche par trois ministres déléguées : Michèle Delaunay aux Personnes âgées et à la Dépendance, Dominique Bertinotti à la Famille et Marie-Arlette Carlotti aux Personnes handicapées. Son premier dossier important concerne l’une des promesses de campagne de François Hollande, à savoir « le retour partiel à la retraite à 60 ans pour les personnes ayant travaillé quarante et un ans sans interruption ».
Elle est la fille du sociologue et économiste Alain Touraine et de la chercheuse chilienne Adriana Arenas Pizarro. De cette paternité elle hérite de son père un goût pour le social et l’économie ainsi qu’une prédilection pour le travail et la discrétion. Du sang de sa mère latino, elle doit une énergie et un tempérament que tous lui reconnaissent. Marisol Touraine est née le 7 mars 1959 à Paris où elle grandit. Après l’école normale et une agrégation de sciences économiques et sociales, elle rentre à Science Po Paris puis fait un cursus à Harvard. En 1988, elle est nommée conseillère chargée des questions géostratégiques dans le cabinet de Michel Rocard alors premier ministre du président François Mitterrand. Elle restera à ce poste jusqu’en 1991, année de la seconde cohabitation des deux septennats Mitterrand. Entre temps, elle épouse Michel Reveyrand de Menthon, ambassadeur de France au Mali de 2006 à 2010, et aujourd’hui en poste au Tchad. Ils ont trois enfants.
Une carrière au service des questions sociales
Sa carrière politique commence vraiment en 1997 lorsqu’elle décide de faire de l’Indre et Loire, sa terre électorale où elle est élue députée dans la troisième circonscription. Mais en 2002, elle la perd face au candidat UMP Jean-Jacques Descamps... pour mieux reconquérir sa cette circonscription en 2007 au second tour avec une courte majorité de 50,22 %. Elle s’investit beaucoup dans le tissu local et depuis 1998, Marisol Touraine est conseillère générale d’Indre-et-Loire, élue dans le canton de Montbazon, et présidente du conseil général d’Indre-et-Loire depuis 2011.
Conseiller d’État, elle s’est immergée depuis 1997 dans les questions de protection sociale et lorsque François Hollande prend les rennes du PS, il lui confie un secrétariat national sur ce thème. Elle est ainsi devenue l’une des rares spécialistes des questions de Sécurité sociale et de santé à l’Assemblée qui ne soit pas issue du monde médical. Concernant ses prises de position et son engagement, Marisol Touraine est membre du Siècle et engagée en faveur du Traité constitutionnel en 2005, et fait aussi partie du think tank socialiste « A gauche, en Europe » crée notamment par Michel Rocard, Pierre Moscovici et Dominique Strauss-Khan en 2003, visant à la refondation du socialisme après le « coup de tonnerre » du 21 avril 2002.
C’est en 2010, où simple députée, elle se fait connaitre au niveau national car elle est en charge pour le PS de l’épineux sujet de la réforme des retraites et se révèle être à l’Assemblée nationale, une opposante tenace à la politique de François Fillon. Le ministre du Travail de l’époque chargé de défendre le texte, Éric Woerth, s’il a dû batailler contre elle reconnaît néanmoins : « Elle a du caractère mais on peut parler avec elle. C’est quelqu’un de sérieux, travailleur, qui a porté ses attaques sur le fond ».
Un engagement politique et social fort pendant la campagne présidentielle
C’est ainsi que soutien dans un premier temps de Dominique Strauss-Khan, elle rejoint François Hollande dès l’éclatement de l’affaire du Sofitel qui lui confie la direction du pôle « Social, Santé, Handicap, Personnes âgées » de la campagne présidentielle. Elle s’engage dès le début de la campagne des primaires derrière François Hollande, et obtient très vite un rôle important dans l’équipe. « C’est un vrai bonheur de travailler avec François Hollande. Il est à la fois à l’écoute et attend beaucoup de notre travail», confiait-elle à 20 Minutes au début de la campagne présidentielle. Elle intervient aussi sur le dossier controversé de « l’euthanasie » dont l’expression est absente des 60 propositions du candidat PS. « On va effectivement dans ce sens », affirmait Marisol Touraine sur Europe1. « Nous voulons définir un cadre qui réponde - au-delà de ce que la loi permet aujourd’hui - aux volontés de ceux qui souffrent », précise-t-elle. Mais elle écarte l’idée d’« autoriser le suicide assisté ».
Pourtant, François Hollande n’a pas tranché à ce sujet même s’il a parlé d’une amélioration des soins palliatifs et s’est avancé prudemment vers un «encadrement». «Il faudra une procédure: quand une personne demande, parce qu’elle n’en peut plus, quand sa famille appuie cette demande, qu’elle est réitérée, que quatre médecins se sont eux-mêmes prononcés, alors il sera possible d’en terminer avec cette souffrance», avait-il expliqué à l’AFP. Mais il n’a jamais parlé de loi, plutôt «d’encadrer cette mort dans la dignité».
Le candidat socialiste lui demande aussi de réfléchir sur une réforme du quotient familial. Elle penche pour une amélioration du système existant plutôt qu’une remise à plat assortie de la création d’un crédit d’impôt imaginée par Michel Sapin. Au lendemain d’une fuite dans la presse, le candidat socialiste tranche pour son idée. Il faut dire que malgré sa discrétion, elle sait monter au créneau quand c’est nécessaire à l’exemple de la veille du sommet social de Nicolas Sarkozy en janvier. Lors d’une interview accordée à 20 Minutes le 17 janvier 2012, elle taxe le sommet social de « gesticulation de campagne ». Et poursuit : «Sur la forme, ce sommet est choquant. Comment peut-il prétendre engager des réformes aussi fondamentales alors que des élections très importantes doivent avoir lieu dans quelques semaines. La plupart des mesures ne pourront même pas être mises en œuvre».
Parité
Marisol Touraine est aussi l’une des premières à insister sur l’importance de la parité dans la composition du gouvernement et se fait un devoir de peser sur cette question dans sa constitution. Le 10 mai 2012, elle avait déclaré à l’AFP : « Il faut des femmes aux postes qui comptent parmi les postes ministériels importants » car « La parité, c’est la pleine reconnaissance du rôle politique des femmes». Ainsi, la nouvelle ministre s’était déclarée en accord avec la sénatrice socialiste Nicole Bricq, qui espérait que les femmes du prochain gouvernement ne seraient pas reléguées à des postes secondaires.
Nicole Bricq, la présidente PS de la commission des finances du Sénat déclarait à Public Sénat le 9 mai 2012 : «Il ne faut pas faire les « Hollandettes », en référence aux « jupettes » du gouvernement Juppé en 1995 qui définissaient des ministres féminins de second plan. Elle ajoutait : « Si on a les sarkozettes bis et les jupettes ter, ce n’est pas bien ». Inquiétude à laquelle Marisol Touraine répondait : «Rien dans le parcours politique de François Hollande ne permet d’imaginer qu’il traiterait les femmes de son gouvernement comme l’a fait Alain Juppé en 1995. Je ne sais rien de la future composition de l’équipe, François Hollande y réfléchit de son côté, mais je n’ai aucun doute sur sa volonté en la matière».